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Ligue Communiste des Travailleurs

Section belge de la Ligue Internationale des Travailleurs -
Quatrième Internationale (LIT-QI)

« L'émancipation des travailleurs sera l'œuvre des travailleurs eux-mêmes. » K. Marx

Newsletter

5 novembre 2015
S.I. de la LIT

Tout le soutien à la lutte palestinienne, vers une troisième intifada

Depuis quelques années, la résistance historique du peuple palestinien semble avancer vers une nouvelle intifada (soulèvement populaire). Ce serait le début de la troisième, après celles de 1987-1993 et de 2000-2004. Les syndicats, les partis de gauche et le mouvement de masse du monde entier doivent soutenir résolument cette lutte.

L'échec des accords d'Oslo

Cela fait plus de 67 ans – depuis la Nakba (catastrophe) palestinienne, avec la création de l'Etat d'Israël, le 15 mai 1948 – que le peuple palestinien fait face à une épuration ethnique sans relâche, avec des ordres de démolition de leurs maisons, des expulsions, l'apartheid, la colonisation et l'occupation.
   La victoire du Premier ministre Benjamin Netanyahu lors des dernières élections a dévoilé plus clairement encore la politique israélienne en vigueur depuis toujours : celle d'assurer l'existence d'Israël dans toute la Palestine historique, comme un Etat sioniste homogène, et donc sans Palestiniens.
   Pour afficher au monde une apparence de « démocratie », Israël ne peut pas exterminer tous les Palestiniens. Il cherche donc à maintenir une minorité sans droits dans des ghettos, comme dans le régime de l'apartheid en Afrique du Sud, pour lui servir de main-d'œuvre bon marché. Mais l'extermination continue, soit par les bombardements périodiques dans la bande de Gaza, soit via les attaques des colons en Cisjordanie, soit par l'emprisonnement dans les geôles israéliennes, soit via le nettoyage ethnique dans les camps de réfugiés des alentours – avec la collaboration des régimes arabes, tels que ceux de Bashar al-Assad et de la monarchie jordanienne – ou l'imposition d'une vie misérable.
   La politique impérialiste dans la région se manifeste dans les accords d'Oslo, signés en septembre 1993 entre le gouvernement d'Israël et le président de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP), Yasser Arafat. Aujourd'hui, l'échec de cette politique saute aux yeux dans le monde. L'oppression des Palestiniens a augmenté, la misère aussi. Le résultat, plus de 20 ans plus tard, ce sont plus de 7000 Palestiniens morts, plus de 12 000 maisons détruites. Entre 1993 et 2000, le nombre de colonies israéliennes construites a doublé, et il atteint actuellement les 600 000. Il s'agit d'occupations de territoires palestiniens par des Israéliens armés jusqu'aux dents et soutenus par l'armée sioniste. Israël détourne l'eau des Palestiniens vers ces colonies. Il y a des effets catastrophiques sur l'économie palestinienne par la fermeture des frontières aux travailleurs palestiniens, qui seraient remplacés par de nouveaux immigrants russes. Selon la journaliste Naomi Klein, le PIB par habitant dans les territoires occupés a chuté de près de 30 % en 1993. La pauvreté chez les Palestiniens a augmenté de 33 %. En 1996, 66 % de la main-d'œuvre palestinienne était au chômage ou était sous-employée. Les accords d’Oslo ont eu comme conséquences moins d'emplois, moins de liberté et moins de terres pour les Palestiniens.
   Les Palestiniens vivent aujourd'hui une situation similaire à celle que les juifs ont subie dans le ghetto de Varsovie, étouffé par les nazis. C'est un crime contre les Palestiniens et un crime contre l'humanité.

La gestation d'une nouvelle intifada

Pour faire face au gouvernement de Netanyahu – qui met à nu l'apartheid et encourage les attaques de colons contre les Palestiniens – et à l'échec des accords d'Oslo, l'héroïque jeunesse palestinienne devient protagoniste d'un processus de résistance qui s'oriente vers une nouvelle intifada.
   Les symptômes de cette troisième intifada font leur apparition depuis 2011, comme l'une des manifestations de la montée du processus révolutionnaire dans le monde arabe. Cette année, le 15 mai, à l'occasion de l'anniversaire de la Nakba, des milliers de réfugiés – en particulier des jeunes – ont marché vers les frontières de la Palestine occupée à partir des camps en Jordanie, en Syrie, au Liban et en Egypte, faisant ainsi savoir au monde que, depuis la création de l'Etat d'Israël, leur droit légitime au retour sur les terres dont leurs familles avaient été expulsées leur est refusé. Le mouvement fut violemment réprimé par les dirigeants arabes. Par la suite, la lutte palestinienne a accompagné les avancées et les reculs du processus révolutionnaire dans le monde arabe, en restant parfois en attente.
   En 2014, une résistance héroïque a répondu à une nouvelle offensive israélienne à Gaza, une résistance qui ne venait pas uniquement de cette étroite bande de territoire. De grandes manifestations en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et dans les territoires occupés par l'Etat d'Israël depuis 1948 ont montré que le processus vers une nouvelle intifada n'était pas rentré dans l'ombre.
   Dans la nuit du 24 juillet 2014 et durant le lendemain, 25 000 Palestiniens sont descendus dans la rue en Cisjordanie. La chanson la plus populaire parmi les jeunes était « Oh Qassam, oh habib, bombardez Tel-Aviv », ce qui mettait en évidence un moral élevé et combatif. (Les brigades Izz al-Din al-Qassam sont la branche armée du Hamas, responsable de la plupart des tirs de roquettes contre des zones occupé par Israël depuis 1948.)
   La principale manifestation a réuni 10 000 personnes à Qalandiya, un village entre Ramallah et Jérusalem qui comprend un camp de réfugiés palestiniens, ainsi que le plus important check-point de l'armée israélienne. Cette armée a ouvert le feu sur des manifestants, assassinant cinq Palestiniens. Dans d'autres villes, il y a eu également des morts. Deux manifestants ont été assassinés à Hawara, près de Naplouse, et trois à Beit Omar, près d'Al Khalil (Hébron en hébreu). Mustapha Barghouti, député palestinien et secrétaire général de l'Initiative nationale palestinienne, a déclaré que c'était la plus grande manifestation palestinienne de toute l'histoire de la Cisjordanie.
   Cette mobilisation fut précédée par d'autres, presque tous les jours, depuis l'assassinat du jeune Palestinien Mohammad Abu Khdeir, brûlé vif à Jérusalem par trois jeunes sionistes, et les bombardements de Gaza suivis par une invasion terrestre.
   En 2015, la poussée pour une nouvelle intifada a pris un nouveau souffle. Dans un article pour le site al-Monitor, le journaliste palestinien Ahmad Melhem écrit que les 11 et 12 juillet, il y eut des manifestations réprimées par les forces israéliennes dans 30 villes et villages palestiniens, à la fois en Cisjordanie, à Jérusalem et dans les territoires occupés en 1948. Les affrontements ont été particulièrement violents à Bethléem, Al Khalil, Jérusalem et Ramallah. L'infâme check-point de Qalandiya fut attaqué avec des pierres et des cocktails molotov, au point d'être occupé par les manifestants pendant une courte période.
   Dans les territoires occupés en 1948, les premières manifestations ont eu lieu en Galilée, avec des affrontements avec la police israélienne à Nazareth, Arara, Umm al-Fahem, Taybeh et Qalanswa. La police a utilisé des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc, alors que les manifestants brûlaient des pneus et scandaient en arabe : « le peuple veut la fin d'Israël ». Par la suite, les manifestations se sont propagées à d'autres villes et villages palestiniens tels que Haïfa et Jaffa, et à Naqab (dans le désert du Néguev).
   Le 30 juillet dernier, à Duma, près de Naplouse, un colon israélien a mis le feu à la maison d'une famille palestinienne, brûlant vifs les occupants. Un bébé de 18 mois, son frère de quatre ans et leur mère y ont trouvé la mort. L'intensification des attaques de colons israéliens contre des Palestiniens durant ces derniers mois et la violation de l'un des principaux lieux saints pour les musulmans, la mosquée al-Aqsa à Jérusalem, ont accéléré ce processus vers la troisième intifada.
   Il est possible que cette intifada, le cas échéant, obtienne une dimension considérable pour diverses raisons.
   D'abord parce que, d'emblée, elle est en train de toucher les territoires palestiniens occupés en 1948, et non pas seulement Gaza et la Cisjordanie (annexée en 1967) comme c'était le cas lors des deux précédentes. Deuxièmement, parce qu'elle peut incorporer également la mobilisation directe des travailleurs palestiniens, au-delà des actions héroïques de la jeunesse palestinienne. La grève générale d'une journée des travailleurs d'Al Khalil en octobre dernier était une expression de cette dynamique possible.
   Troisièmement, parce que l'isolement politique d'Israël dans le monde est en augmentation, malgré tout le soutien que lui apportent l'impérialisme et la grande presse bourgeoise. Au cours de la dernière invasion de Gaza, par exemple, Israël a perdu la bataille pour la conscience des masses dans le monde. Les déclarations de Netanyahu, répudiées y compris par ses alliés, de blâmer les Palestiniens pour la « solution finale » de Hitler, ont démontré non seulement les mensonges de ce dirigeant assassin, mais aussi le fait que l'on ne peut plus rien attendre de cet Etat. D'autres dirigeants se disputent la popularité à côté de Netanyahu, comme Lieberman, qui propose ouvertement l'expulsion sommaire de tous les Palestiniens de l'ensemble du territoire qui leur appartient. Le caractère nazi-fasciste de cet Etat est en train de se révéler avec davantage d'insistance.
   Pour ces raisons, il est possible qu'une troisième intifada ait davantage de poids dans la région et dans le monde entier.

Les révolutions arabes et la résistance palestinienne : même combat

On ne peut pas dissocier ce mouvement du processus révolutionnaire dans le monde arabe. Les puissants ennemis de la cause palestinienne, dénoncés par le révolutionnaire palestinien Ghasan Kanafani dans son analyse de la révolution de 1936-1939, sont toujours là actuellement : la bourgeoisie palestinienne, les régimes arabes et l'impérialisme / sionisme.
   La plupart de la gauche dans le monde a déclaré la fin de la révolution arabe, étant donné les impasses et les reflux conjoncturels qui existent dans tout processus révolutionnaire. Cette nouvelle intifada est une démonstration supplémentaire du fait qu'ils ont complètement tort.
   Dans la recherche de la stabilité dans la région – qui doit garantir la sécurité d'Israël –, on tente d'étrangler à tout prix la révolution en Syrie. Après la chute en cascade de quatre dictateurs – en Tunisie, en Egypte, au Yémen et en Libye – et l'entrée en scène du Printemps arabe à la fin de 2010, l'impérialisme intervient directement et indirectement pour contenir l'effet domino. L'organisation Etat islamique est un élément contre-révolutionnaire qui finit par faire le jeu de l'impérialisme et faciliter son intervention militaire. En Syrie, la révolution qui cherche à renverser le dictateur sanguinaire Bachar al-Assad a tourné en guerre civile en 2011. Le prétexte du combat contre l'Etat islamique, mis en avant par l'impérialisme, est utilisé maintenant par la Russie et les alliés du régime syrien pour bombarder les zones libres qui échappent encore au joug de Bashar al-Assad.
   La Russie et les Etats-Unis ont conclu un accord militaire entre eux pour « coordonner » l'utilisation de l'espace aérien en Syrie : une division du travail pour décider « qui bombarde ici, et pas là ».[1] La Russie, les Etats-Unis et Israël sont en coordination militaire en Syrie pour étouffer la lutte contre le dictateur al-Assad.
   Ici est mise à nu la farce de la gauche castro-chaviste qui défend le dictateur syrien al-Assad comme « anti-impérialiste ». Le génocidaire al-Assad, qui est en train de détruire le pays en tuant et en expulsant des millions de gens afin de rester au pouvoir, est soutenu par l'alliance militaire des Etats-Unis et de la Russie, avec également le soutien d'Israël. C'est le même al-Assad qui a encerclé et veut détruire le camp de réfugiés de Yarmouk, un bastion historique de la résistance palestinienne en Syrie. Et le même Etat d'Israël qui tue les Palestiniens contribue à soutenir al-Assad.
   En ce moment, une nouvelle intifada devrait entraîner une nouvelle montée dans le monde arabe, qui peut aider à relancer la résistance dans toute la région. Cela aurait une énorme importance, étant donné l'autorité politique des Palestiniens dans tout le monde arabe. Les indices s'accumulent, comme le 16 octobre en Jordanie où, dans plusieurs villes, il y a eu de grandes manifestations pour exiger la fin des accords avec Israël.

Pour un Etat palestinien unique, laïque et démocratique

Contrairement aux deux précédentes intifadas palestiniennes, le mouvement vers un nouveau soulèvement populaire a lieu maintenant sans aucune direction ; et en particulier, il remet en question, indirectement, la collaboration de l'Autorité nationale palestinienne (ANP) avec Israël. Les jeunes ne se voient représentés par aucun parti traditionnel. En alliance avec la classe ouvrière, ils doivent construire au sein de ce processus une direction révolutionnaire pour faire avancer la lutte pour la libération de la Palestine.
   C'est dans le feu de la lutte contre l'occupation qu'il existe des conditions pour forger une nouvelle direction pour le mouvement palestinien, une direction qui rejette la conciliation avec l'ennemi et qui unifie le peuple palestinien dans la perspective de la libération de toutes les terres palestiniennes, du fleuve jusqu'à la mer.
   La solution pour prendre en compte l'ensemble des Palestiniens, dont la plupart vivent en-dehors de leurs terres, est un Etat palestinien unique, laïque et démocratique, avec des droits égaux pour tous les hommes et les femmes qui veulent vivre en paix avec les Palestiniens. Cela implique la destruction de l'Etat nazi-fasciste d'Israël. La coexistence d'un Etat palestinien avec l'Etat d'Israël – tel que défini dans les accords d'Oslo – s'est avérée impossible, comme nous l'avons toujours affirmé.
   On ne peut pas coexister avec le fascisme, il faut le détruire. Il était impossible de coexister avec le nazisme, il fallait le vaincre. Il ne s'agit pas d'un conflit religieux, mais de la destruction nécessaire de l'Etat d'Israël, bastion militaire de l'impérialisme dans le monde arabe. Il est possible que les juifs et les musulmans vivent ensemble pacifiquement dans un Etat palestinien laïque et démocratique, comme cela a été le cas dans le passé.

Solidarité

   La solidarité internationale est un élément fondamental. Il est nécessaire que tous les syndicats et partis de gauche dénoncent les atrocités de l'Etat israélien. Il faut mettre en œuvre des journées internationales de lutte, coordonnées avec les manifestations palestiniennes. L'unité d'action la plus large en solidarité avec la lutte palestinienne est essentielle.
   Il est possible et nécessaire de discuter démocratiquement les différences programmatiques entre tous les secteurs, sans pour autant empêcher l'unité d'action la plus large contre l'Etat israélien.
   Parallèlement à cela, on peut renforcer les campagnes comme celle de BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions) contre Israël. Il est essentiel de rejoindre la campagne mondiale pour empêcher la présence de ce pays aux Jeux olympiques de 2016 au Brésil, où une société israélienne de sécurité sera présente, avec le soutien du gouvernement brésilien, pour sécuriser ce méga-évènement.
   La LIT se place inconditionnellement du côté de la résistance palestinienne et rejoint les actions dans le monde entier en soutien à sa lutte.

Secrétariat international de la LIT-QI
le 5 novembre 2015

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1 www.elmundo.es/internacional/2015/10/17/5621d2e946163fd80a8b45e6.html